Sabine_Wespieser_logo.gif










Une vue exceptionnelle.jpg RENTRÉE 2019
le 29 août 2019
LITTÉRATURE FRANÇAISE
Jean Mattern
Une Vue Exceptionnelle
RÉSUMÉ :
Je ne te dis jamais à la légère que tu es tout pour moi, Émile. Ce serait fou de vouloir prétendre le contraire. Mais tu n’effaceras jamais ces quelques mois, ce passé où je me voyais un autre avenir, un autre rôle. Apprendre à être le père de Simon. Alors malgré toi, en étant tout, tu me rappelles à chaque instant ce qui me manque. Je n’ai jamais pu oublier cette sensation : Simon lové contre moi quand je le sortais du bain, ou quand je le portais jusqu’à son lit, Simon abandonné dans mon cou après s’être endormi dans la voiture. Ce jour de la lettre, quand Laura eut fini ses explications et que j’eus compris que tout était fini, j’ai demandé à l’embrasser une dernière fois dans son sommeil, j’ai rassemblé quelques affaires et j’ai pris le métro jusqu’à Heathrow. Sûr de rien, à part d’avoir emporté la photo prise par Laura dans Hyde Park, Simon sur mes épaules qui éclate de rire, je suis torse nu et Gabriel est revenu trois semaines après, récupérer ce fils qui était presque le mien, l’histoire est banale, car combien de femmes abandonnées osent fermer la porte au père de leurs enfants quand il revient, alors exit mes rêves de paternité, un billet d’avion plus loin il fallait tout recommencer. Le premier appartement en arrivant à Paris a fait l’affaire, une grande baie vitrée, cette vue exceptionnelle sur la Seine, la fortune familiale dans les grands crus allait aussi payer pour ça, et aujourd’hui j’y suis encore, le cadre avec la photo de Hyde Park aussi, toujours au même endroit, Simon et moi, je l’ai accroché en posant mes bagages ici, rien n’a changé sauf qu’il doit avoir vingt-huit ans maintenant.

David déserte Londres quand la femme dont il s’apprêtait à adopter le petit garçon le quitte. À Paris, il s’installe dans le premier appartement venu, avec une grande baie vitrée sur la Seine. Encore sous le choc, il accepte sans arrière-pensée de montrer à l’homme qui l’aborde sur un banc de l’île aux Cygnes, en contrebas de chez lui, sa vue exceptionnelle.

Vingt-cinq ans plus tard, David et Émile habitent ensemble le lieu de leur rencontre. Émile, jeune interne à l’époque, est à présent un neurochirurgien réputé. David, tout à ses biographies de musiciens oubliés et à leur vie harmonieuse avec Émile, est parfaitement heureux. Mais la courte période où il a failli devenir père se rappelle parfois à lui comme un rêve récurrent… et le vertige le saisit. Émile le sait bien, dont les certitudes et la froideur clinique vacillent le jour où, sur son carnet de rendez-vous, il voit inscrit le nom de Simon Weber. Car il sait bien aussi que ce patronyme est celui du fils perdu de son compagnon.

Commence alors un magnifique pas de deux, où le sentiment amoureux se conjugue au sourd désir de paternité de David, dans l’alternance de troublants monologues intérieurs. Subtil interprète de la complexité des émotions, Jean Mattern interroge ici, avec beaucoup de délicatesse, ces vies que nous aurions pu vivre si le destin en avait décidé autrement.

L'AUTEUR : Jean Mattern est né en 1965 dans une famille originaire d’Europe centrale. Il vit à Paris et travaille dans l’édition. Chez Sabine Wespieser éditeur, il a déjà publié quatre romans, parmi lesquels, en mai 2018, le très remarqué Bleu du lac, lauréat du prix Livres & Musiques de Deauville 2019.


Mur Mediterranee.jpgLouis Philippe Dalembert©OlivierDion 2.jpg












Le 29 août 2019
Louis-Philippe Dalembert
Mur Méditerranée
RÉSUMÉ :
À Sabratha, sur la côte libyenne, les surveillants font irruption dans l’entrepôt où sont entassées les femmes. Parmi celles qu’ils rudoient pour les obliger à sortir, Chochana, une Nigériane, et Semhar, une Érythréenne. Les deux amies se sont rencontrées là, après des mois d’errance sur les routes du continent. Grâce à toutes sortes de travaux forcés et à l’aide de leurs proches restés chez eux, elles se sont acharnées à réunir la somme nécessaire pour payer les passeurs, à un prix excédant sans cesse celui d’abord fixé. Ce soir-là pourtant, au bout d’une demi-heure dans la benne d’un pick-up fonçant feux éteints, elles sentent l’odeur de la mer. Un peu plus tôt, à Tripoli, des familles syriennes, habillées avec élégance comme pour un voyage d’affaires, se sont installées dans les minibus climatisés garés devant leur hôtel. Ce 16 juillet 2014, c’est enfin le grand départ. Dima, son mari et leurs deux fillettes ont quitté leur pays en guerre depuis un mois déjà, afin d’embarquer pour Lampedusa. Ces femmes si différentes – Dima la bourgeoise a pris possession du pont, Chochana et Semhar sont dans la cale – ont toutes trois franchi le point de non-retour et se retrouvent à bord du chalutier, unies dans le même espoir d’une vie meilleure en Europe. Les portraits tout en justesse et en empathie que peint Louis-Philippe Dalembert de ses protagonistes – avec son acuité et son humour habituels – donnent à leurs existences singulières cette épaisseur de vie et de chair que leur nouvelle condition de « migrantes » ne leur accordera pas toujours quand elles auront enfin débarqué. Lors de l’effroyable traversée, sur le rafiot de fortune dont le véritable capitaine est le chef des passeurs, leur caractère bien trempé leur permettra de résister aux intempéries et aux avaries. Luttant âprement pour leur survie, elles manifesteront même une solidarité que ne laissaient pas augurer leurs origines si contrastées. S’inspirant de la tragédie d’un bateau de clandestins sauvé par le pétrolier danois Torm Lotte en 2014, Louis-Philippe Dalembert déploie ici avec force un ample roman de la migration et de l’exil.

L'AUTEUR : Louis-Philippe Dalembert est né à Port-au-Prince et vit à Paris. Il publie depuis 1993 chez divers éditeurs, en France et en Haïti, des nouvelles, de la poésie, des essais et des romans. Le dernier en date, Avant que les ombres s’effacent, paru en mars 2017 chez Sabine Wespieser éditeur, a remporté le prix Orange du Livre et le prix France Bleu/Page des libraires.


Girl.eps LITTÉRATURE ÉTRANGÈRE
Le 12 septembre 2019
Edna O’brien
Girl
roman traduit de l'Irlandais par Aude de Saint-Loup et Pierre-Emmanuel Dauzat
RÉSUMÉ : Girl est un roman sidérant, qui se lit d’un souffle et laisse pantois. Écrivant à la première personne, Edna O’Brien se met littéralement dans la peau d’une adolescente enlevée par Boko Haram. Depuis l’irruption d’hommes en armes dans l’enceinte de l’école, on vit avec elle son rapt, en compagnie de ses camarades de classe ; la traversée de la jungle en camion, sans autre échappatoire que la mort pour qui veut tenter de sauter à terre ; l’installation dans le camp, avec obligation de revêtir uniforme et hijab. La faim, la terreur, le désarroi et la perte des repères sont le lot quotidien de ces très jeunes filles qui, face aux imprécations de leurs ravisseurs, finissent par oublier jusqu’au son de leurs propres prières.
Mais le plus difficile commence quand la protagoniste de ce monologue halluciné parvient à s’évader, avec l’enfant qu’elle a eu d’un des djihadistes. Après des jours de marche, un parcours administratif harassant lors de son arrivée en ville, celle qui a enfin pu rejoindre son village et les siens se retrouve en butte à leur suspicion – et à l’hostilité de sa propre mère. Victime, elle est désormais coupable d’avoir introduit dans leur descendance un être au sang souillé par celui de l’ennemi.
Composé dans l’urgence et la fièvre, Girl bouleverse par son rythme et sa fureur à dire, une fois encore, le destin des femmes bafouées. Dans son obstination à survivre et son inaltérable confiance en la possible rédemption du coeur humain, l’héroïne de ce très grand roman s’inscrit dans la lignée des figures féminines nourries par l’expérience de la jeune Edna O’Brien, mise au ban de son pays alors qu’elle avait à peine trente ans.
Aujourd’hui l’un des plus grands écrivains de ce siècle, elle nous offre un livre d’une sombre splendeur avec, malgré tout, au bout du tunnel, la tendresse et la beauté pour viatiques.

L'AUTEUR : Née dans l’ouest de l’Irlande en 1930, Edna O’brien vit à Londres. Elle écrit depuis près de soixante ans, et elle est publiée dans le monde entier. Lauréate en 2018 du prix PEN America/Nabokov pour la portée internationale de son oeuvre, elle a été anoblie par Élisabeth II. En France, Sabine Wespieser éditeur publie depuis 2010 ses nouveaux livres. Le dernier en date dans l’ordre de l’écriture, Les Petites Chaises rouges (2016), a été finaliste du prix Femina et du prix Médicis. Girl paraît simultanément chez Sabine Wespieser éditeur et dans son édition originale anglaise chez Faber.


Les textes sont de l'éditeur.
Crédit photo : Olivier Dion.