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LITTÉRATURE FRANÇAISE
LE 21 août 2014
Oeuvres vives de Linda Lê

Un jeune journaliste parisien, de passage au Havre, découvre un livre d’un écrivain nommé Antoine Sorel, qui se trouve avoir toujours habité linda-le_oeuvres-vives_V3.inddc ette ville. Le lendemain de cette découverte, si importante dans sa vie de lecteur, le jeune journaliste apprend la mort de l’écrivain, qui s’est suicidé à l’âge de quarante-cinq ans. Sans se dire qu’il y a un « mystère Sorel », le jeune admirateur décide de mener l’enquête et de retrouver ceux qui avaient été proches de Sorel pour les interroger, certain qu’en rassemblant les témoignages il réussirait à écrire un livre d’hommage, à faire le portrait de celui qu’il considère déjà comme un créateur inclassable.

Des amis du mort, un de ses frères, son père, des femmes qu’il a connues, tous accepteront de parler, et le jeune journaliste, régulièrement, se rendra au Havre, découvrant ainsi la ville natale de Sorel. Il enregistrera les propos des témoins et cherchera jour après jour à mener à bonne fin la tâche qu’il s’est fixée, quoiqu’il se heurte à bien des difficultés.

Portrait d’un écrivain en rupture avec le monde dans lequel il vivait, enquête sur un fils qui a peut-être souffert d’être condamné par son père, tombeau d’un homme perdu qui a marqué la vie de plusieurs femmes, ce livre est aussi une interrogation sur un sécessionniste qui a choisi un cheminement solitaire mais a quand même laissé de profonds souvenirs chez ceux qui ont croisé sa route et qui, presque tous, rendent hommage à son art, qu’ils l’aient compris ou pas.

Née en 1963 au Viêt-nam, Elle apprend le français dès l’enfance. Arrivée en France en 1977, deux ans après la fin de la guerre du Viêt-Nam, elle a pris le chemin de la littérature. Après trois livres parus lorsqu’elle était très jeune, elle a publié Les Evangiles du crime dont une presse unanime a salué l'originalité exceptionnelle. En 1993, Christian Bourgois a édité son cinquième livre, le roman Calomnies puis en 1995, Les dits d'un idiot. Les Trois Parques et Voix ont paru en 1998, Lettre morte en 1999, Personne en 2003, Kriss/L’homme de Porlock en 2004 et In memoriam en 2007. Elle a reçu le prix Wepler-Fondation La Poste en 2010 pour son roman Cronos et le prix Renaudot-poche en 2011 pour À l’enfant que je n’aurai pas (Nil). enfin Lame de fond en 2012.

Le 4 septembre 2014
Totale éclipse de Cécile Wajsbrot

wajsbrot_totale_eclipse_V4.inddCe nouveau roman de Cécile Wajsbrot commence de la même façon que la célèbre chanson popularisée par Roberta Flack, et plus tard par les Fugees : Killing me Softly with his Song. Quelqu’un écoute une chanson, dans un bar, et croit entendre raconter sa vie. Killing me softly with his song, Telling my life with his words, telles sont les paroles du refrain. Ainsi, au début du roman, dans le café où la narratrice a l’habitude d’aller, elle entend une chanson qui la plonge dans le souvenir d’une histoire, le souvenir de sentiments auxquels elle croyait avoir renoncé.

Photographe, elle est aussi dans un moment de perte d’inspiration. Une rencontre imprévue la replonge, de nouveau, dans les affres de l’amour. La création artistique et la vie se mêlent, l’une est au service de l’autre mais les données de l’équation s’inversent en cours de route. Le but étant de parler de l’effet que les chansons qui nous accompagnent un moment, ou toute notre vie, produisent sur nous. Ce parcours intérieur est en effet scandé par l’écoute de chansons, leur genèse, leur histoire ; une quinzaine de titres des années 60 à nos jours, allant de Leonard Cohen à Amy Winehouse, de Radiohead à Françoise Hardy, en passant par les Pink Floyd ou Patti Smith.

Cécile Wajsbrot est née à Paris en 1954. Elle partage aujourd’hui son temps entre l’écriture de ses livres et son activité de traductrice l’anglais et l’allemand. Depuis une dizaine d’années elle vit à Paris et Berlin. Conversations avec le maître (2007) et L'Île aux musées (2008) sont les deux premiers romans du cycle Haute Mer dont elle poursuit l’exploration avec Sentinelles (2013).

LITTÉRATURE ÉTRANGÈRE
Le 21 août 2014
La vie amoureuse de Nathaniel P. de Adelle Waldman (États-Unis)

L’écrivain new yorkais, Nate Piven est une star montante. Après une première vie sérieuse et rébarbative de premier de la classe, waldman_vie_amoureuse.indd suivie dequelques années de vaches maigres, il vient de signer un contrat généreux pour un roman. De plus, il ne cesse d’être sollicité par de nouveaux magazines qui souhaitent le faire contribuer à leurs dossiers. Quant aux femmes, il est entouré des plus belles et des plus désirables : Juliet, reporter économique de haut vol ; Elisa, sa somptueuse ex-petite amie ; et Hannah, que « presque tous considèrent comme gentille et intelligente, ou intelligente et gentille », qui n’a pas son pareil dans les conversations entre amis. Mais lorsque l’une de ces histoires devient plus sérieuse que les autres, Nate est contraint de se demander ce qu’il souhaite réellement.



Pour qui s’est un jour demandé pourquoi les hommes font les choses qu’ils font, Adelle Waldman plonge dans la psyché d’un mâle moderne imparfait, souvent exaspérant – un jeune homme qui porte sur lui un jugement bien au-delà du superficiel, mais qui lutte en permanence avec sa propre anxiété, liée aux femmes. Il a pourtant l’habitude de les laisser tomber d’une manière qui fait de lui un emblème de notre époque. De même qu’il apporte un regard de l’intérieur sur ce qu’un jeune homme pense réellement du sexe, des femmes et de l’amour. Ce livre prouve que, dans le monde littéraire du XXIème siècle, l’esprit et l’art de la conversation sont loin d’être morts. L’amour l’est-il ?

Adelle Waldman est née en 1977 à Baltimore. Elle est diplômée de la Brown University et de l’école de journalisme de Columbia University. Elle a travaillé comme reporter au New Haven Register, au Cleveland Plain Dealer, et a tenu une rubrique pour le site du Wall Street Journal. Elle a également publié des articles dans le supplément littéraire du New York Times, entre autres. Elle vit à Brooklyn avec son mari, l’écrivain Evan.

Le 28 août 2014
Toute la terre qui nous possède de Rick Bass (États-Unis)

Les bass_terre_nous_possede_V4.inddhommes aiment à raconter l’histoire de la terre qu’ils foulent, de même que la terre préserve la trace de leur passage, accumulant ces traces que fouleront d’autres hommes et d’autres femmes dont le destin sera ainsi transformé.
C’est ce dont Rick Bass s’efforce de rendre compte dans Toute la terre qui nous possède. Ce roman se présente comme la terre, en strates superposées d’histoires et d’époques :
1966 - Odessa, Ouest Texas. Richard, jeune géologue, supervise les puits pétrolifères en exploitation dans la région et parcourt le désert et la barrière rocheuse avoisinante en compagnie de Clarissa, à la recherche de fossiles et d’ossements que Clarissa vend au musée d’Austin ou au vieux de chasseur de trésors Herbert Mix. 1933 - Une génération plus tôt, la famille Omo habite sur la rive du lac salé Juan Cordona. Max, le père, et les deux fils récoltent le sel. La famille mène une existence de labeur et de souffrance, sans eau potable, sous la menace des dunes changeantes qui ensevelissent régulièrement leur maison. Une nuit où Mary, la mère, ne dort pas, elle voit un éléphant traverser le lac salé. Le lendemain, c’est toute la troupe d’un cirque itinérant qui arrive à la poursuite de l’animal.
1967-1975 Mexique - Pour oublier son histoire avec Clarissa, Richard est parti travailler au Mexique. Là, il côtoie des hommes abîmés, qui rongent la terre et que la terre ronge. Des hommes qui dévastent, chassent la nuit, dans des avions, les bêtes sauvages, se saoulent et meurent à petit feu.
1976 - Richard revient à Odessa. Son chemin croise de nouveau celui de Herbert Mix qui, lui-même, a croisé celui de Mary Omo, qui a quitté les rives du lac salé. Deux nouveaux personnages apparaissent au cours de cette époque : Ruth, jeune institutrice, qui crée sa propre école, et Annie, la petite fille adoptée par Mary.
Toute la terre qui nous possède est un roman foisonnant de vie, de vies et d’histoires de ces vies. On y fait successivement la rencontre d’une beauté locale à la peau d’une pâleur surnaturelle, d’un chercheur de trésor unijambiste, d’un éléphant poursuivi par une meute de chiens, de joueurs de football locaux qui traînent des chariots, de chariots qui jonchent le désert, d’un désert qui mène droit à un lac salé gardé par des sentinelles squelettiques et de statues de sel qui pivotent dans le vent…

Né en 1958, Rick Bass a grandi à Houston, Texas, avant de faire des études de biologie et de géologie à l’université de l’Utah. Il travaille pendant plusieurs années dans le Mississippi comme géologue spécialisé dans les gisements de pétrole et de gaz, ainsi qu’en témoigne son livre, Oil Notes. Rick Bass dit avoir appris à écrire en lisant les romans de Jim Harrison, Eudora Welty et Thomas McGuane. Il a bénéficié de bourses d’écriture de la part de différentes structures, dont la Fondation Guggenheim et la Fondation Lyndhurst, l’Institut texan des Lettres et l’Institut des Arts et Lettres du Mississippi. Il a enseigné la creative writing à l’Université du Montana, du Texas, de la Caroline du Nord-Wilmington et à l’Université d’Etat de l’Iowa. Il est l’auteur d’une trentaine de livres. L’Ermite a été élu par le Los Angeles Times comme le meilleur livre de l’année. Ses nouvelles et ses essais, pour lesquels il a reçu le prix Pushcart et la O. Henry Award, ont paru dans de nombreuses anthologies rassemblant les meilleurs textes américains du genre. Le Sud profond et le Montana constituent les décors privilégiés de ses fictions. Il vit dans la vallée du Yaak, dans le Montana, avec sa femme et ses deux filles.


Tous les jours sont des nuits de Peter Stamm (Allemagne)

Elle s’appelle Gillian, elle est belle, elle a du succès, elle est aimée. Le début du livre renvoie toutes ces phrases au passé, y comprisstamm_jours-sont-nuits.indd lapremière.Est-elle en effet encore Gillian au moment où débute le roman ? N’a-t-elle pas tout perdu, jusqu’au reflet d’elle-même ?Une nuit, au retour d’une soirée trop arrosée, après une dispute, Gillian et son mari Matthias, qui travaillent tous deux pour la télévision, ont un accident de voiture en heurtant un chevreuil sur une petite route qui traverse la forêt. Matthias, qui conduisait, meurt sur le coup. Gillian se réveille à l’hôpital et découvre qu’elle n’a plus de visage. Toute la belle façade s’écroule, tout ce qui faisait sa vie a disparu. Gillian doit subir plusieurs opérations de chirurgie plastique. Elle qui était toujours entourée, admirée, sollicitée, découvre la solitude et l’absence de vraie amitié. Même sa mère n’ose plus aller la voir. Pour Gillian, les jours deviennent des nuits.

Après cette première partie, Peter Stamm fait un saut en arrière et raconte la rencontre entre Gillian et Herbert, un artiste qui peint des nus à partir de photos. Croisé sur un plateau de télévision, il finit, après quelques échanges de mails, par photographier et peindre Gillian nue dans son atelier. Ce sont en fait les photos de ce travail qui ont déclenché la dispute fatale avec Matthias. Ce dernier avait en effet découvert par hasard la pellicule dans un tiroir du bureau de Gillian et l’avait faite développer. Outre un fort sentiment de culpabilité, Gillian en retire l’idée que l’art peut tuer – mais aussi la conviction que sa vie n’était jusque-là qu’une simple mise en scène fondée sur les apparences.

La troisième partie nous emmène sept ans plus tard. Herbert traverse une crise existentielle. Incapable de peindre depuis plusieurs années, il a finalement accepté un poste de professeur aux Beaux-Arts. Un jour, il reçoit l’invitation d’une fondation culturelle dans les montagnes de l’Engadine, qui lui donne carte blanche pour faire une exposition. Après de longues hésitations, il finit par accepter, d’autant plus que sa compagne, avec qui il a un petit garçon de sept ans maintenant, vient de le quitter.

C’est là qu’il retrouve Gillian qui, après sa guérison, a fui le monde des médias et a trouvé un travail d’animatrice culturelle, loin de la ville et de ses attraits, dans le centre de loisirs qui jouxte la fondation culturelle. Peter Stamm est trop bon romancier pour confier cette rencontre au hasard : c’est en fait Gillian (qui se fait désormais appeler Jill) qui a convaincu le directeur du centre culturel d’inviter Hubert et de lui proposer de faire une exposition. Si tous les jours sont des nuits quand l’amour disparait, les nuits peuvent devenir des jours quand le bonheur d’être ensemble est là, pour reprendre les dernières lignes du sonnet de Shakespeare mis en exergue au début du livre. Mais Peter Stamm sait aussi éviter les pièges des réconciliations prématurées – c’est le prix de la liberté de ses personnages qui ne réagissent pas toujours comme on l’attend. Ici, la vie n’est pas un songe, elle est un jeu dont on doit maitriser les règles pour ne pas se faire rejeter. Mais dont on peut aussi rejeter les règles, si on en a le courage.

Peter Stamm est né en 1963 en Suisse. Après des études de commerce, il a étudié l’anglais, la psychologie et la psychopathologie. Il a longuement séjourné à Paris, à New York et en Scandinavie. Il a travaillé comme comptable et comme journaliste. Depuis 1998 il vit de sa plume. Il a écrit de nombreuses pièces pour la radio et pour le théâtre, cinq romans, quatre recueils de nouvelles et trois livres d'enfant. En 2013 il a figuré sur la dernière sélection du Man Booker International Prize. En 2014 il a reçu le Prix Friedrich Hölderlin, qui a récompensé l’ensemble de son œuvre. Il vit avec sa famille à Winterthur.

Le 11 septembre 2014
Une saison de coton de James Agee (États-Unis)

agee_saison_coton_V5-B.indd Voici enfin publié pour la première fois, plus de soixante-quinze ans après sa rédaction, un reportage signé James Agee que l’on croyait à tout jamais perdu, une enquête sur le métayage du coton dans l’Alabama qui devait donner lieu, plusieurs années plus tard, au célèbre ouvrage Louons maintenant les grands hommes (1941)

En 1936, le magazine Fortune, pour lequel Agee travaille, décide de l’envoyer dans l’Alabama afin de décrire les conditions de vie de trois familles de métayers du coton. Agee insiste pour que le photographe Walker Evans l’accompagne et c’est ainsi que les deux hommes vivront plusieurs semaines durant avec les Burroughs, les Tingle et les Fields. Tandis qu’Evans réalise certains de ses clichés les plus célèbres, Agee décrit minutieusement les existences de ces hommes, femmes et enfants, afin que nous en comprenions parfaitement chacun des aspects, qu’il s’agisse du travail, de la nourriture, des maisons, des vêtements, de la santé, de l’éducation ou des loisirs.

Profondément bouleversé et indigné par les conditions de vie ces trois familles de métayers, Agee a produit un compte rendu journalistique qui émeut par sa beauté et sa virulence, une charge contre le capitalisme qui explique, à n’en pas douter, pourquoi Fortune rejeta l’article et qui demeure, de nombreuses décennies plus tard, d’une féroce actualité.

Le 18 septembre 2014
Histoire d'un raisonneur de Fernando Pessoa

pessoa_histoire_raisonneur.indd C’est vers 1906-1907 que Fernando Pessoa, grand admirateur d’Edgar Allan Poe et d’Arthur Conan Doyle, commença à rédiger la première des quatre histoires policières qu’il écrirait en anglais et qui sont présentées ici. Bien qu’inachevés, ces textes illustrent parfaitement l’idée que Pessoa se faisait de la littérature policière : elle doit divertir l’esprit et reposer uniquement sur le personnage du détective, comme il l’explique dans l’essai sur lequel s’achève ce volume.

Dans un décor anglais de la fin du XIXe siècle, nous découvrons William Byng, ex-sergent et détective amateur qui, en présence du narrateur – son fidèle ami Thomas – reçoit la visite de femmes éplorées, à moins que la police ne fasse appel à lui pour résoudre une affaire. L’homme est un rêveur, un philosophe, un métaphysicien mort d’avoir trop bu au moment où son ami relate ses souvenirs. Humain, trop humain dans sa brusquerie et son impatience, qui le rendent à l’occasion discourtois, Byng peut aussi rougir de plaisir quand son auditoire saisit tous les détails des raisonnements qu’il expose tant pour disculper des écoliers (« L’Affaire du professeur de sciences ») que pour mettre au jour la vraie nature d’une société secrète (« L’Affaire de M. Arnott ») ou encore d’un problème mathématique évoquant un langage chiffré (« L’Affaire de l’équation quadratique »). En effet, avant même d’être un détective, c’est un raisonneur qui, une fois en possession de certains faits, élabore tous ses arguments sur sa connaissance du cœur et de l’esprit humains, autrement dit de ce qui constitue le caractère.

L’enquête est donc en majeure partie un processus intellectuel au cours duquel Byng s’adonne à une fascinante analyse des tempéraments. Qu’il s’agisse du courage, de la peur, de l’égoïsme, du sentiment d’insuffisance ou encore de perte, c’est toujours sur le fondement du caractère que l’ex-sergent réussit à affirmer la véracité d’un témoignage et à démasquer le coupable.

L’importance du fonctionnement de l’esprit et de la nécessité d’une méthode fait l’objet d’un traitement particulier dans le quatrième récit, « Le Document Dérobé », qui vise à réhabiliter aux yeux du public un personnage de « La Lettre volée » de Poe ; tentative originale, malgré sa nature incomplète, d’introduire une vérité historique au sein de la fiction.

Enfin, « Histoire policière » est une étude approfondie des règles du genre, illustrée par la critique de nombreuses œuvres qui révèle l’ampleur des connaissances de Pessoa en la matière. Simplicité de l’intrigue, nécessité d’une histoire purement intellectuelle, refus des coïncidences, analyse des caractères et primauté de la déduction à partir de faits tous exposés d’emblée, tels sont les principaux ingrédients de l’histoire policière idéale : celle qui respecte les attentes du lecteur tout en le surprenant par des conclusions dépassant son intelligence et auxquelles le détective aura abouti « sans bouger de son fauteuil ».

« C’est le raisonnement du détective qui constitue l’intrigue de l’histoire policière ». Voilà ce que Pessoa nous démontre en pratique comme en théorie, des années avant la création du « déchiffreur » Abílio Quaresma. Et si le détective doit être le personnage principal de cette histoire, son raisonnement en est ici le véritable héros.

Pessoa est né en 1888 à Lisbonne. Pendant trente ans, de son adolescence à sa mort, il ne quitte pas sa ville de Lisbonne, où il mène l'existence obscure d'un employé de bureau. Mais le 8 mars 1914, le poète de vingt-cinq ans, introverti, idéaliste, anxieux, voit surgir en lui son double antithétique, le maître « païen » Alberto Caeiro, suivi de deux disciples : Ricardo Reis, stoïcien épicurien, et Álvaro de Campos, qui se dit «sensationniste ». Un modeste gratte-papier, Bernardo Soares, dans une prose somptueuse, tient le journal de son « intranquillité », tandis que Fernando Pessoa lui-même, utilisant le portugais ou l'anglais, explore toutes sortes d'autres voies, de l'érotisme à l'ésotérisme, du lyrique critique au nationalisme mystique. Pessoa, incompris de son vivant, entassait ses manuscrits dans une malle où l'on n'a pas cessé de puiser, depuis sa mort en 1935, les fragments d'une œuvre informe, inachevée, mais d'une incomparable beauté.


Les résumés sont de l'éditeur.