tout_piller_tout_bruler.jpgÀ l'occasion du recueil de nouvelles de Wells Tower Tout piller, tout brûler qu'il publie Francis Geffard nous a accordé une interview. Celle-ci est un véritable crève-coeur. On écoute ce passionné de littérature américaine avec envie car il passe 24 heures par jour à faire ce qu’il aime, à défendre ses jeunes auteurs, le tout avec une humilité désarmante. Le regard de Joseph Boyden - qui s’enfile expresso sur expresso juste à côté- s’illumine d’admiration lorsque l’éditeur de Terres d’Amérique arrive « c’est Francis qui a lancé ma carrière ». Que dire de plus.


Lalettredulibraire.com : Votre opération du mois de mai s’intitule « Bonnes Nouvelles d’Amérique » est-ce pour contredire l’adage selon lequel les mauvaises nouvelles viennent souvent des USA ?
Francis Geffard : C’est un petit jeu de mot avant tout pour défendre la nouvelle, sous-estimée en France, malgré de grands auteurs comme Flaubert ou Maupassant. en France, le roman est considéré comme supérieur et la nouvelle un genre mineur. De plus, elles n’ont pas la faveur de la presse. Hors pour moi, c’est la quintessence de la littérature. Chez Albin Michel, une envie de nouvellistes peut donner corps à une vraie collection à découvrir autour du recueil de Wells Tower et de Kevin Canty.

Lalettre : Comment cette passion pour l’Amérique vous est-elle venue?
F.G. : Tout simplement, très jeune, je lisais beaucoup de littérature américaine qui m’ont révélé plus que d’autres. C’est une littérature qui m’a donné le goût de lire, une littérature très riche, très variée avec des auteurs importants comme jack London, Dos Passos. Plus on connaît quelquechose, plus on envie de la connaitre à fond et de la faire découvrir aux autres. Découvrir de jeunes auteurs tout en faisant sortir la littérature américaine d’une seule et même tradition.

Lalettre : Terres d’Amérique est une collection qui ne répond à aucun critère de mode – vos auteurs sont la plupart du temps inconnu et/ou publient leurs premiers textes - est-ce pour cela qu’elle dure ?
Saisons_de_la_solitude.jpg F.G. : Elle dure parce que le patron d’Albin Michel la laisse durer. C’est une grande chance de sortir de jeunes auteurs inconnus, c’est un travail difficile, plus difficile que de piquer des auteurs à un autre éditeur. Les premiers auteurs publiés par Terres d’Amérique sont aujourd’hui moins anonymes.

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Lalettre : Il y a peu de femmes au catalogue.
F.G. : Si la collection avait été fondée par une femme, peut être y aurait-il plus de femmes au catalogue. Cependant, dans les deux ans qui viennent, nous en publions plusieurs. Mais, ce n’est pas ma sensibilité, je publie essentiellement des hommes. A l’inverse, Olivier Cohen (1) publie beaucoup de femmes américaines. Il n’y a évidemment aucune discrimination opérante. A la rentrée 2010, il y aura deux auteurs femme.

Lalettre : Le livre numérique est une réalité pour Albin Michel, l’est-elle aussi pour Terres d’Amérique?
F.G. :Oui, elle l’est déjà. Une réalité installée très tôt chez Albin Michel. C’est une donnée du domaine littéraire comme une autre.

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Lalettre : Avec les moyens technologiques actuels, pourquoi ne pas vous installer dans l’Ouest américain?
F.G. : Je souhaite être au bon endroit pour publier mes auteurs, en allant au USA pour les découvrir et être en France pour les présenter et les défendre auprès du public, des critiques, des bibliothécaires et des libraires. Je souhaite être un passeur entre ces deux cultures et faire ce travail difficile de découverte d’un auteur, de travail sur son manuscrit, de traduction et de diffusion auprès du grand public. Ces tâches qui sont la partie immergée de l’édition d’un livre est la partie la plus importante pour moi.




(1) Directeur des éditions de l'Olivier. Remerciements : Francis Geffard, Claire Lajonchère, éditions Albin Michel.