Gérard Garouste est aujourd’hui un peintre de renommée internationale. Il est exposé à Paris ou New York et ses toiles se vendent à des prix remarquables, a fortiori pour un artiste vivant. Mais l’autobiographie qu’il publie cette année aux éditions l’Iconoclaste nous dévoile l’envers du vernis. Ce qui l’a motivé à peindre des dessins puis des toiles sombres, aux limites de la folie.
Cette ombre qui plane sur sa vie comme un vautour est celle de son père, Henri Auguste Garouste (1919-2008). Dans le privé, cet homme qui posait un pistolet sur la table pendant le dîner, fut un véritable tyran domestique pour Gérard Garouste et sa mère. Un homme qui se félicite de l’arrivée des Allemands à Paris en juin 1940 « enfin libre » écrit-il dans son journal. Un homme qui va en profiter pour voler les meubles des juifs déportés et les revendre ensuite. Il ne se reniera jamais.
Il n’avait pas pu faire héros, alors il avait fait salaud. Son éducation de bon catholique l’y préparait. Il appartenait à un monde d’illusions et de certitudes, où les juifs avaient sale réputation. On ne saurait être plus clair.
Gérard Garouste, fils unique écrasé par tant de haine, tente de s’échapper par l’enfermement, d’abord dans des pensionnats puis dans des hôpitaux psychiatriques. Il faut en avoir pour accepter que l’enfermement, l’isolement et les traitements médicaux soient les seuls remèdes pour fuir ce père ou pour réclamer soi-même son enfermement lorsqu’une crise de démence approche. Accepter que sa propre femme vous emmène à l’hôpital pour vous protéger de vous et de votre père.
Le livre s’ouvre sur la mort du père et se referme sur la restitution d’un sous-main volé par celui-ci à l’arrière-petite-fille de sa véritable propriétaire. Aujourd’hui, Gérard Garouste a envie d’aller vers une peinture plus gaie. Comme on le comprend.
L’intranquille Autoportrait d’un fils, d’un peintre, d’un fou
Gérard Garouste & Judith Perrignon
Collection Proche
Août 2022 (réédition)