Piccasso illustrateur Tourcoing.jpgLe Musée des Beaux Arts (MUBA) Eugène-Leroy de Tourcoing accueille l’exposition « Picasso illustrateur » jusqu’au 13 janvier 2020. Elle donne à voir un aspect plus méconnu de cet artiste prolifique et multifacette qui n’hésitait pas à dire « Donnez-moi un musée et je le remplirai ». L’exposition propose une sélection méticuleuse d’œuvres « illustrées » embrassant l’ensemble de la carrière de Pablo Picasso, accompagnée de chefs d’œuvre majeurs de l’artiste, de documents d’archives, de films et d’extraits sonores. « Illustrées » au sens que l’artiste donnait à ce mot, c’est-à-dire non pas au sens premier de mettre en lumière, mais dans l’idée de créer une nouvelle relecture.

Et, de fait, c’est bien à la lecture ou à la relecture que cette exposition nous invite, et nous faisons le choix ici de présenter quelques œuvres illustrées par le maître. En premier lieu, la revisite d’un grand classique de la littérature, « les Métamorphoses », poème latin composé par Ovide, probablement en l’an I et composé de 15 livres. La centaine de récits issue de la mythologie grecque et romaine contenus dans ce poème fait partie de notre patrimoine culturel. Qui n’a jamais entendu parler de L’enlèvement d’Europe, de Daphné, de Philémon et Baucis… ? Mais ces récits sont finalement plus connus par le biais des artistes inspirés par le caractère spectaculaire de ces histoires (peintres, sculpteurs, musiciens) que par la lecture du texte d’origine. Picasso nous invite à le redécouvrir en version illustrée par 15 eaux fortes qui sont parues dans le livre édité par Albert Skira.

Redécouverte également d’un auteur classique, Honoré de Balzac, au travers d’une de ses nouvelles intitulée « Le chef d’œuvre inconnu ». Cette nouvelle, parue en 1831 dans la revue « L’artiste », a été intégrée à la « Comédie Humaine » en 1846. Elle a pour objet l’insatisfaction perpétuelle de l’artiste devant sa propre création, qu’il perfectionne sans cesse mais ce faisant, finit par la rentre illisible. Le peintre et son modèle représente un des thèmes majeurs de l’œuvre de Pablo Picasso, il n’est donc pas surprenant qu’il ait choisi d’illustrer « Le chef d’œuvre inconnu ».

Picasso a collaboré avec plusieurs poètes, parmi lesquels Pierre Reverdy que l’on peut situer, comme Guillaume Apollinaire, dans la mouvance de Stéphane Mallarmé, et de fait associé au cubisme et aux débuts du surréalisme. Comme ses contemporains, Reverdy prône l’importance des recherches formelles et du travail poétique (par opposition avec l’improvisation) dans la quête de formes brèves d’une simplicité volontaire. L’objectif est de rapprocher deux mots au sens éloigné pour faire apparaître des liens secrets entre les choses, créer des chocs visuels et intellectuels, ce que l’auteur nomme « le choc poétique ». Picasso, qui disait de Reverdy qu’il écrit comme un peintre, a illustré une des œuvres majeures du poète, le « Chant des Morts ». Cette suite de 43 poèmes parue en 1948 est en résonance directe avec les années d’occupation et les déportations dans les camps de concentration. Les textes interagissent avec 125 lithographies de Picasso, grands signes rouges qui sont autant d’illustrations organiques des vers poétiques.



Enfin, pour les lecteurs en quête de pragmatisme, on citera le manuel théorique et pratique de la tauromachie « La tauromaquia » écrit par le torero José Delgado, alias Pepe Illo, et source d’inspiration pour Picasso qui l’a illustré de 26 aquatintes au sucre.

Picasso Illustrateur
Musée des Beaux Arts Eugène-Leroy de Tourcoing
19 octobre 2019 > 13 janvier 2020
Exposition avec le soutien exceptionnel du Musée national Picasso-Paris