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Cent mille ans de solitude. Le dernier roman de Volodine offre une vision envoûtante, post apocalyptique et chamanique de la Deuxième Union Soviétique. Cartésiens s’abstenir.

Quittant une voie ferrée, Kronauer arrive à Levanidovo, portant sur son dos une des trois filles de Solovïeï, Samiya Schmidt, rencontrée dans la forêt alors qu’il allait chercher du secours pour ses amis Vassilissa Marachvilli et Iliouchenko. Vagabond perdu dans une odyssée hors du temps, Kronauer va tenter de poursuivre une existence qui n’a plus de sens. Avancer, continuer, ne pas réfléchir. C’est ce que font les personnages de ce roman, qui errent tous mi-vivants mi-morts, mourants ou immortels, à la recherche d’un avenir qui n’existe pas, ou d’un passé qui n’existe plus dans ce no-man’s land où la société et la famille n’existent plus non plus.

Terminus radieux est un roman étonnant et brillamment réussi : c’est une épopée sans héros et perdue d’avance, qui n’a ni début ni fin, dans un univers qu’Enki Billal et Gabriel Garcia Marquez ne renieraient pas. Volodine poursuit son exploration du bardo, l’état intermédiaire semblable au rêve que les bouddhistes situent entre deux renaissances, qu’il avait entamé en 2005 (Bardo or not Bardo).

L’écriture est magique et entraînante : difficile de sortir de ce roman de 600 pages, qui se lit pourtant tellement vite - grâce à la fragmentation du récit, certainement - et grâce à ces personnages de femmes filles nées de mères inconnues, de chamane soviétique fou et incestueux qui tente de « ravoir » les morts pour les faire travailler, ou de Mémé Oudgoul qui parle à une pile atomique. Difficile de ne pas se laisser embarquer dans ce Terminus Radieux. Un roman carcéral pour ceux qui ont envie d’évasion.

Terminus radieux
Antoine Volodine
Points Seuil
576 pages, 8,60€
Paru le 20/08/2015

Article publié le 5 septembre 2015